Pierrick Gardien

Pierrick Gardien

Avocat Droit Public
Enseignant aux Universités de Lyon

Ligne directe : 07.80.99.23.28

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Untitled 1Le Conseil d’État se prononcera prochainement sur la légalité du port du hidjab par des footballeuses. Après le rejet d’un premier référé-liberté pour défaut d’urgence (n°458092), des militantes pro-hidjab ont en effet saisi la Haute juridiction en novembre 2021 d’un recours au fond. Elles contestent l’interdiction par la Fédération française de football (FFF) du port de ce vêtement religieux prosélyte. Si le Conseil d’État venait à invalider cette interdiction, le port du hidjab pourrait être autorisé dans tout le sport français. Seule une loi pourrait trancher définitivement cette question.

Le régime juridique applicable dépend de la personne concernée.

Si les fonctionnaires sont astreints à une stricte obligation de neutralité leur interdisant de manifester leurs convictions religieuses dans le cadre du service, il n’en va pas de même des usagers du service public.

Les usagers ont en effet, a priori, tout à fait le droit d’exprimer et de manifester leurs convictions religieuses. Une femme portant le foulard peut ainsi tout à fait se présenter au guichet d’une mairie, à condition qu’il ne dissimule pas l’intégralité de son visage (loi du 11 octobre 2010).

Ce n’est que de manière exceptionnelle que la loi interdit à l’usager du service public de manifester ses convictions religieuses : c’est le cas par exemple dans les écoles, les collèges et les lycées publics sur le fondement de la loi du 15 mars 2004.

De la même manière, seules des considérations liées au bon fonctionnement du service ou des impératifs d’ordre public, de sécurité, de santé et d’hygiène peuvent permettre de fonder une interdiction du port des signes religieux ostensibles, sous le contrôle du juge administratif qui veille à la stricte nécessité des mesures prises (circulaire ministérielle du 15 mars 2017). Le voile pourra ainsi être interdit à l’hôpital s’il entrave la qualité des soins (Charte de la personne hospitalisée).

L’interdiction du port du voile dans le football résulte de l'article 1er des statuts de la FFF qui dispose que :

« La Fédération et ses organes déconcentrés, en tant qu'organes chargés d'une mission de service public déléguée par l'État, défendent les valeurs fondamentales de la République française et doivent mettre en œuvre les moyens permettant d'empêcher toute discrimination ou atteinte à la dignité d'une personne, en raison notamment de (...) ses convictions politiques et religieuses./ Par ailleurs, le respect de la tenue règlementaire et la règle 50 de la Charte olympique assurent la neutralité du sport sur les lieux de pratique./ A ce double titre, sont interdits, à l'occasion de compétitions ou de manifestations organisées sur le territoire de la Fédération ou en lien avec celles-ci : /(...)/- tout port de signe ou tenue manifestant ostensiblement une appartenance (...) religieuse (...),/- tout acte de prosélytisme (...), /(...)./Toute personne contrevenant à ces dispositions fera l'objet de poursuites disciplinaires et/ou pénales./Les officiels doivent veiller au respect des dispositions susvisées ".

En l’état du droit applicable, il est possible de douter de la légalité de cet article adopté par la FFF.

Celles qui se revendiquent comme les « hidjabeuses » doivent être regardées juridiquement comme des usagers du service public.

Or, tel qu’il a été vu, l’usager du service public n’est pas soumis par principe à l’obligation de neutralité et son corollaire la laïcité.

Il nous paraît par ailleurs difficile de soutenir que le port du voile dans le football porterait atteinte au bon fonctionnement du service ou à des impératifs d’ordre public, de sécurité, de santé et d’hygiène. Tout juste pourrait-on considérer que le port du voile entrave la pratique de la « tête » dans le football ou qu’il entraînerait un risque d’étranglement des joueuses pendant l’effort, mais l’argumentation est hasardeuse.

C’est donc à la loi et à la seule loi qu’il incombe de réglementer le port du voile dans le football, pour trancher la question.

En l’absence de disposition législative en ce sens, il y a fort à parier que le Conseil d’État puisse donner prochainement raison aux « hidjabeuses » contre la FFF et cette décision fera tache d’huile dans tout le sport.

Comme les convictions politiques, nous estimons que le sport n’est pas le lieu de la manifestation des convictions religieuses et du prosélytisme, mais celui de l’universalisme. Sauf à exacerber plus encore les tensions sociales, le sport doit rester, en quelque sorte, le dernier espace de liberté sans politique et sans religion. C’est le seul moyen d’en encourager la pratique auprès du plus grand nombre et de créer des évènements populaires rassemblant fraternellement la société dans son ensemble.

Sauf à créer un dangereux précédent, il est urgent que les parlementaires inscrivent donc très prochainement dans la loi l’interdiction du port des signes religieux ostensibles lors de toutes les compétitions sportives.
Untitled 1Pour être candidat à l’élection présidentielle, il faut avoir 18 ans et surtout recueillir « 500 signatures ».

Cette règle vise à éviter qu’il y ait trop de candidats et des candidats pas sérieux.

1. Qui peut donner sa signature ?

Ce sont surtout les maires qui peuvent donner leur signature. Au dernier recensement, il y avait 34 488 maires en France.

Mais il y a aussi :

  • Les députés, sénateurs et députés européens,
  • Les conseillers régionaux et départementaux,
  • Les présidents d’EPCI,
  • Les élus d’outre-mer,
  • Et d’autres.

Soit environ 42 000 personnes pouvant donner leur signature.

2. Y a-t-il d’autres conditions ?

Oui, chaque élu ne peut parrainer qu’un seul candidat.

Le parrainage donné ne peut plus être retiré.

Et les signataires doivent venir d'au moins 30 départements sans que plus d'un dixième ne viennent d'un même département. Il faut donc recueillir des signatures partout en France.

C’est le Conseil constitutionnel qui centralise et contrôle la validité des parrainages.

Tous les parrainages doivent être adressés au plus tard 6 semaines avant le premier tour de la présidentielle.

3. Pourquoi ce système peut poser problème ?

Un parrainage n’est pas un soutien donné à un candidat. C’est simplement lui donner le droit de concourir à la présidentielle. C’est donc très démocratique.

Mais la plupart des Français pensent l’inverse, et les élus hésitent donc à « parrainer » un candidat. Surtout dans les petites communes (les plus nombreuses) où les élus sont en général apolitiques (ni de gauche ni de droite) et ne veulent pas être marqués politiquement vis-à-vis de leurs électeurs.

Avant, les parrainages étaient anonymes. Mais depuis 2016 et une réforme voulue par François Hollande, les parrainages sont publiés, donc tout le monde peut savoir quel élu a parrainé quel candidat.

Cela freine encore plus les élus qui hésitent beaucoup à donner leur parrainage, surtout aux candidats les plus clivants.

Enfin, les parrainages sont envoyés directement par les élus au Conseil constitutionnel. Le candidat ne peut donc pas être sûr que le parrainage a bien été envoyé et donc qu’il en a bien 500 avant la date limite.

4. Quelles solutions ?

En réalité, la loi parle de « présentation » et pas de « parrainage ». Il faudrait donc cesser d’utiliser le mot parrainage qui prête à confusion.

Il faudrait surtout réinstaurer la règle du secret absolu des parrainages afin que les élus n’aient pas peur de les donner, même à un candidat qui ne représente pas leurs idées.

Certains proposent d’abandonner purement et simplement cette condition, ou de donner le droit de parrainer à tous les citoyens français.

***

Texte de référence :

« I. – Au plus tard le quatrième vendredi précédant le premier tour de scrutin ouvert pour l'élection du Président de la République, le Gouvernement assure la publication de la liste des candidats. Lorsqu'il est fait application du cinquième alinéa de l'article 7 de la Constitution, cette publication a lieu quinze jours au moins avant le premier tour de scrutin. La liste des candidats est préalablement établie par le Conseil constitutionnel au vu des présentations qui lui sont adressées par au moins cinq cents citoyens membres du Parlement, des conseils régionaux, de l'Assemblée de Corse, des conseils départementaux, du conseil de la métropole de Lyon, de l'Assemblée de Guyane, de l'Assemblée de Martinique, des conseils territoriaux de Saint-Barthélemy, de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon, du Conseil de Paris, de l'assemblée de la Polynésie française, des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie, de l'assemblée territoriale des îles Wallis-et-Futuna, maires, maires délégués des communes déléguées et des communes associées, maires des arrondissements de Paris, de Lyon et de Marseille, conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger ou présidents des conseils consulaires. Les présidents des organes délibérants des métropoles, des communautés urbaines, des communautés d'agglomération, les présidents des communautés de communes, le président du conseil exécutif de Corse, le président du conseil exécutif de Martinique, le président de la Polynésie française, le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et les ressortissants français membres du Parlement européen élus en France peuvent également, dans les mêmes conditions, présenter un candidat à l'élection présidentielle. Les présentations doivent parvenir au Conseil constitutionnel au plus tard le sixième vendredi précédant le premier tour de scrutin à dix-huit heures. Lorsqu'il est fait application des dispositions du cinquième alinéa de l'article 7 de la Constitution, elles doivent parvenir au plus tard le troisième mardi précédant le premier tour de scrutin à dix-huit heures. Une candidature ne peut être retenue que si, parmi les signataires de la présentation, figurent des élus d'au moins trente départements ou collectivités d'outre-mer, sans que plus d'un dixième d'entre eux puissent être les élus d'un même département ou d'une même collectivité d'outre-mer. ».


Untitled 1Aux Sables-d’Olonne, une statue de l’archange Saint Michel agrémente depuis 2018 la promenade des passants de la place Saint-Michel, dans le quartier Saint-Michel (Le Figaro). Mais une association de « libres penseurs » s’y oppose et a demandé au tribunal administratif de Nantes de déboulonner la statue, au nom de la laïcité.

Cette association est coutumière de ce genre d’actions puisqu’elle s’oppose chaque année à l’installation de crèches de Noël dans les mairies et a déjà obtenu le retrait de la statue de Jean Paul II installée sur la place du village de Ploërmel (France 3). L’année dernière, la croix de fer qui trônait au sommet du Pic Saint-Loup dans l’Hérault a également été découpée à la scie et au chalumeau avec l’inscription « Le pic laïque » (France 3).

La question juridique du litige aux Sables-d’Olonne est celle de la conformité avec l’article 28 de la loi du 9 décembre 1905, qui dispose que : « Il est interdit (…) d'élever ou d'apposer aucun signe ou emblème religieux (…) en quelque emplacement public que ce soit, à l'exception des édifices servant au culte (…) ».

Ces dispositions, qui ont pour objet d’assurer la neutralité des personnes publiques à l’égard des cultes, s’opposent à l’installation par celles-ci, dans un emplacement public, d’un signe ou emblème manifestant la reconnaissance d’un culte ou marquant une préférence religieuse, sous réserve des exceptions qu’elles ménagent (CE, 25 octobre 2017, Fédération morbihannaise de la Libre Pensée et autres, n° 396990).

En la matière, le Conseil d’État fait une stricte distinction entre ce qui relève de l’artistique et du religieux. C’est sur cette base qu’il a pu faire retirer la statue de Jean-Paul II installée à Ploërmel en le regardant comme Pape et non comme chef d’État (même décision).

De la même manière, le Conseil d’État sépare le culturel du cultuel, en tenant du contexte, qui doit être dépourvu de tout élément de prosélytisme, des conditions particulières de l’installation, de l'existence ou de l'absence d'usages locaux, mais aussi du lieu de l’installation (CE, 14 février 2018, Fédération de la libre pensée de Vendée, n°416348).

Ainsi, une crèche de Noël installée dans une mairie ne sera légale que si elle présente un caractère culturel, artistique ou festif, mais non si elle exprime la reconnaissance d’un culte ou une préférence religieuse (CE, 9 novembre 2016, Fédération départementale des libres penseurs de Seine-et-Marne, n°395122).

Le rapporteur public du tribunal administratif de Nantes a conclu la semaine dernière à l’illégalité de la statue de l’archange Saint Michel aux Sables-d’Olonne et la décision est attendue pour courant décembre (Ouest France).

Il ne fait guère de doute que l’enlèvement de la statue sera prononcé. Même si l’œuvre est dépourvue de croix ou d’emblème religieux stricto sensu, il sera difficile de regarder juridiquement la statue d’un archange comme dénuée de caractère religieux.

L’argument de l’emplacement de la statue est toutefois plus sérieux, car si l’archange est installé sur une place publique, cette place constitue aussi le parvis de l’église Saint Michel attenante. Or que serait une église sans son parvis ? En d’autres termes, le parvis d’une église est-il dissociable de cette dernière, et peut-on y appliquer des règles juridiques différentes ?

Il est indéniable que les fidèles arpentent le parvis à l’occasion de toutes les cérémonies religieuses et que la place présente donc une utilité pour le culte. Seul cet argument pourrait permettre de sauver la statue, en la faisant entrer dans une des exceptions prévues à l’article 28 de la loi du 9 décembre 1905. Il ne fait toutefois peu de doute qu’il sera rejeté par le tribunal administratif, qui évitera toute contorsion juridique.

La statue de l’archange Saint Michel sera donc prochainement déboulonnée sur décision de justice aux Sables-d’Olonne. Au-delà du débat juridique, il faudra un jour s’interroger collectivement sur l’opportunité d’une application aussi littérale de la règle de droit, au nom d’une certaine vision de la laïcité.

Lire aussi :

- Jean-Paul II face au Conseil d'État
- Comment installer (légalement) une crèche de Noël dans sa mairie ?



Untitled 1Conseil d’État, 28 septembre 2021, n°431625

Le Conseil d’État a pris prétexte d’un litige opposant des masseurs-kinésithérapeutes à une commune pour trancher une question importante : une personne publique peut-elle légalement louer un de ses biens pour un loyer inférieur à sa valeur locative ?

Le contexte est assez simple : une commune avait signé un contrat de location de locaux professionnels avec un masseur-kinésithérapeute à des conditions préférentielles, c’est-à-dire en dessous des prix pratiqués sur le marché locatif.

Or quatre autres masseurs-kinésithérapeutes ont attaqué en justice ce contrat, l’estimant illégal. Ils considéraient que ce « prix d’ami » caractérisait une concurrence déloyale à leur détriment et qu’en favorisant ainsi l’implantation d’un de leurs confrères, la commune n’avait pas respecté la loi.

Dans un premier temps, le Conseil d’État a constaté après examen des pièces du dossier que les conditions du bail conclu par la commune en question étaient en effet bien plus favorables que celles du marché compte tenu du loyer moyen au mètre carré versé par d'autres professionnels de santé pour des locaux similaires.

Dans un second temps, le Conseil d’État a posé le principe suivant : une personne publique ne peut légalement louer un bien à une personne poursuivant des fins d'intérêt privé pour un loyer inférieur à la valeur locative de ce bien, sauf si cette location est justifiée par des motifs d'intérêt général et comporte des contreparties suffisantes.

Dans le cas qui lui était présenté, la justification pouvait par exemple être de favoriser l’installation d’un professionnel de santé dans une zone rurale sinistrée comportant une offre insuffisante de soins pour cette profession. Mais ce n’était pas le cas concrètement en l’espèce, puisque quatre autres masseurs-kinésithérapeutes étaient présents sur le territoire concerné, et le Conseil d’État a donc statué en défaveur de la commune.

Il faut donc retenir que la commune peut tout à fait louer un de ses biens pour un loyer inférieur à sa valeur locative, à condition de le justifier par un motif d'intérêt général et prévoir des contreparties suffisantes.

Une commune rurale sans médecin pourrait donc louer un de ses biens à un praticien à un loyer inférieur au marché en contrepartie d’un engagement du thérapeute à exercer un certain temps sur le territoire par exemple… à condition qu’il n’y ait bien aucun médecin déjà sur place (désert médical).

Cette clarification du Conseil d’État est bienvenue, car elle sécurise la prise de décision de certaines collectivités, surtout en zone rurale. Reste à savoir jusqu’où peut aller la décote ainsi opérée…
 
jeudi, 18 novembre 2021 10:02

35H : l’État contre Anne Hidalgo

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Le 25 octobre 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Paris a suspendu l’application du nouveau règlement du temps de travail des agents de la Ville de Paris voulu par Anne Hidalgo. Le juge administratif a considéré qu’un doute sérieux sur la légalité de ce règlement, qui prévoit une durée annuelle de travail effectif des agents inférieure à la durée légale nationale obligatoire, était caractérisé.

Dans une optique d’égalité, la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique a décidé la suppression progressive des régimes dérogatoires aux 35H qui se maintenaient depuis 2001 dans certaines collectivités territoriales, avec un horizon au 1er janvier 2022 au plus tard pour s’aligner.

Ceci implique, pour chaque collectivité, de prévoir une durée annuelle de travail effectif des agents de 1 607 heures.

Mais certaines collectivités ont refusé d’appliquer le nouveau régime, préférant maintenir leur régime dérogatoire illégal. C’est le cas de la Ville de Paris, qui a choisi d’adopter un nouveau règlement concernant le temps de travail de ses personnels violant délibérément la loi du 6 août 2019 en maintenant une durée annuelle de travail effectif des agents de 1 552 heures seulement (délibération 2021 DRH 39 des 6, 7, 8 et 9 juillet 2021).

Dans le cadre de ce règlement, 3 jours de congés supplémentaires par rapport à la règle nationale sont alloués par la Ville de Paris à ses agents au nom d’une pénibilité qui serait spécifiquement liée au travail dans la capitale, notamment compte tenu de la pollution et du bruit.

C’est ce que prévoit une nouvelle sujétion créée par le règlement « au titre de l’intensité et de l’environnement de travail induisant une pénibilité spécifique pour les agents (…) exposés de manière générale à des niveaux importants de bruit et de pollution atmosphérique et soumis à des conditions de travail particulière du fait de la sursollicitation du territoire et des services publics parisiens liés à l’activité de la ville-capitale ».

Mais la loi ne prévoit pas de dérogation possible à la durée hebdomadaire de travail de 35H pour les fonctionnaires territoriaux, décidée sur le plan national depuis 2001 et réaffirmée le 6 août 2019.

En outre, alors que la loi prévoit une harmonisation obligatoire au 1er janvier 2022 au plus tard, le nouveau règlement de la Ville de Paris décide d’une entrée en vigueur vague et progressive sur le premier semestre de l’année 2022.

Le règlement de la Ville de Paris, qui a la valeur d’un acte administratif, entre directement en violation de la loi du 6 août 2019, qui a par nature une valeur législative et lui est donc supérieure.

Conformément aux pouvoirs qu’il détient de l’article L2131-6 du CGCT et surtout de l’article 72 de la Constitution, le préfet de la région d’Ile-de-France, préfet de Paris, qui a la charge du respect des lois n’a donc pas eu d’autre choix que de déférer le nouveau règlement du temps de travail des personnels de la Ville de Paris au tribunal administratif, au titre du contrôle de légalité.

Le préfet a assorti son recours d'une demande de suspension en référé de l’acte attaqué, dans l’attente du jugement au fond du litige.

Par une ordonnance du 25 octobre 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Paris, a donné raison à l’État en estimant qu’un doute sérieux existait quant à la légalité de deux dispositions du nouveau règlement du temps de travail des agents de la Ville de Paris.

La première porte sur les conditions d’entrée en vigueur progressive de ce règlement, alors même que la loi de transformation de la fonction publique prévoie en effet une entrée en vigueur au plus tard au 1er janvier 2022.

La seconde porte sur l’octroi à la totalité des agents de la Ville de Paris, indépendamment de la nature de leur mission et de la définition des cycles de travail qui en résultent, de 3 jours de congés supplémentaires en raison de la pénibilité de leurs conditions de travail, qui ne résulte d’aucune pièce ni d’aucune étude, si ce n’est cette seule affirmation. Au demeurant, le juge rappelle que même dans l'hypothèse où des agents se voient attribuer des jours de congés excédant le nombre de jours de congés légaux, il appartient à l'autorité compétente de définir une organisation des cycles de travail qui concilie cette décision avec le respect impératif de la durée annuelle de 1 607 heures du temps de travail, à laquelle la collectivité ne peut donc pas porter atteinte.

Il ne fait aucun doute que cette ordonnance de référé sera confirmée au fond. La situation donne en effet à juger une violation élémentaire de la hiérarchie des normes par la Ville de Paris, qui a essayé maladroitement de se défendre en référé en invoquant des difficultés « de paramétrage dans l’outil (informatique) de gestion des temps (de travail) ». On peut toutefois légitimement subodorer que la volonté de faire obstacle à l’application de la loi qui rehausserait le temps de travail des agents de la Ville de Paris est politique, dans le contexte d’une élection présidentielle.

Mais la loi de transformation de la fonction publique ne vient que fixer une date butoir pour corriger un régime illégal qui perdure depuis plus de vingt ans dans de nombreuses collectivités, dont Paris. La loi est la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse, dit notre Déclaration des droits de l’homme. Il serait injuste que certains agents, parce qu’ils habitent la capitale, bénéficient d’un régime très favorable, par rapport aux agents territoriaux de toutes les autres villes de France.

Depuis les vagues de décentralisation, les collectivités territoriales s'administrent librement par des conseils élus et disposent d'un pouvoir réglementaire pour l'exercice de leurs compétences. Cependant, cette autonomie ne leur permet pas de s’affranchir de l’application nationale des dispositions législatives. Car si la France est décentralisée, elle est aussi déconcentrée et elle n’est en aucun cas un État fédéral.

Paris, comme les autres collectivités, doit le comprendre.

 
Untitled 1Le samedi 13 novembre 2021, le maire de la commune de Laillé près de Rennes a pris un arrêté interdisant la chasse à proximité des maisons ainsi que l’usage de carabines dans sa commune. Cette mesure radicale fait suite à une multiplication des accidents de chasse sur cette commune rurale, qui ont notamment coûté la vie à un automobiliste (Ouest France).

Mais cet arrêté municipal est-il bien légal ?

Il n’entre pas dans les pouvoirs du maire de réglementer de manière générale et absolue la chasse sur son territoire en l’absence de circonstances particulières. La police de la chasse incombe en effet à l’État et donc au préfet (article L. 420-2 du code de l’environnement).

Il n’en demeure pas moins que le maire dispose de pouvoirs de police et est responsable de l’ordre de public sur le territoire de sa commune (article L. 2212-2 du CGCT). Ceci signifie que, lorsque les circonstances s’y prêtent et qu’un risque en matière de sécurité publique est constaté, le maire est fondé ponctuellement à intervenir.

La multiplication d’accidents de chasse sur une même commune constitue indéniablement un risque en matière de sécurité publique qui justifie l’intervention du maire.

C’est ce qu’a déjà jugé le Conseil d’État :

« à la suite d'incidents ayant opposé des non-chasseurs à un chasseur sur le territoire de sa commune, à proximité d'une habitation, le maire de la commune de Cellieu a (…) interdit par l'arrêté attaqué, en date du 14 novembre 1987, "toute action de chasse, en particulier les tirs, dans un périmètre fixé à 200 mètres des habitations quelles qu'elles soient" (…) le maire n'a, en l'espèce compte-tenu des atteintes déjà portées à la sécurité des habitations de la commune de Cellieu, ni excédé les pouvoirs de police (…) ni pris une mesure disproportionnée par rapport aux risques encourus par les habitants en élargissant de 150 à 200 mètres le périmètre interdit à la chasse autour des habitations » (CE, 13 septembre 1995, n°127553)

Le 25 mai 2021, la Cour administrative d’appel de Douai a également validé un arrêté réglementant la chasse à courre sur le territoire d’une commune compte tenu d’incidents répétés en zone urbanisée (n°20DA00793).

Le juge administratif exige toutefois que la mesure soit circonstanciée, limitée dans le temps et dans l’espace. Ceci se comprend aisément, car elle doit viser à remédier à une situation préoccupante pour la sécurité publique (multiplication des incidents)… jusqu’au retour de l’ordre public.

Si l’intervention du maire de Laillé près de Rennes est justifiée compte tenu de la multiplication des accidents de chasse sur cette commune et de leur gravité, la mesure sera probablement rétoquée dans ses modalités, car elle est trop générale (interdiction illimitée de « l’usage des carabines » sur le territoire de la commune) et prévoit une application infinie dans le temps.

Le texte pourrait être facilement amélioré en limitant l’interdiction à des parties bien définies de la commune, comme les zones urbanisées, avec une application différenciée dans le temps et dans l’espace.

Quant à la réglementation plus générale de la pratique de la chasse qu’appellent de leurs vœux des associations de protection de la nature, elle ne relève pas des pouvoirs du maire, mais de ceux de l’État qui pourrait se saisir de la question.

Untitled 1Présider un bureau de vote, être assesseur, siéger en commission d’appel d’offres… certains conseillers municipaux rechignent parfois à exercer ces fonctions qu’ils estiment ingrates. Mais la sanction peut être lourde, puisque la loi prévoit la démission d’office pour les élus locaux réfractaires.

C’est l’article L. 2121-5 du CGCT qui prévoit que tout membre d'un conseil municipal qui a refusé de remplir une des fonctions qui lui sont dévolues par les lois est déclaré démissionnaire d’office (1). Une stricte procédure doit toutefois être respectée (2) et une excuse valable peut permettre d’excuser l’élu (3).

Si les conditions sont réunies, c’est le tribunal administratif qui prononce la démission d’office du conseiller municipal (4) ce qui emportera des conséquences sur le conseil municipal lui-même (5).

1. La démission d’office doit être justifiée par le refus de remplir une des fonctions dévolues par les lois aux conseillers municipaux

La loi considère que certaines fonctions sont inhérentes à la qualité de conseiller municipal, qui ne peut donc pas s’en affranchir. Elles font partie, en quelque sorte, de l’exercice normal de son mandat. Il s’agit principalement des fonctions suivantes :

- La présidence des bureaux de vote (CE, 20 février 1985, Behuret, n°62778) ;
- La fonction d’assesseur (CE, 26 novembre 2012, n°349510) ;
- La participation à la commission d’appel d’offres (CAA de Douai, 14 décembre 2012, Commune de Quiévy, n°12DA01359).

Le conseiller municipal qui refuse sans excuse valable d’exercer une de ces trois fonctions risque donc la démission d’office.

Mais toutes les fonctions ne sont pas de nature à justifier une telle mesure. Ainsi, n’exposent pas l’élu à la démission d’office :

- Le refus de participer à une séance du conseil municipal (CE, 6 novembre 1985, Ville de Viry-Châtillon, n°68842) ;
- Le refus d’assurer une permanence facultative en mairie (CE, 8 juillet 1987, Commune de Vatilieu c/ Gandaubert, n°73215) ;
- Le refus de participer à une cérémonie commémorative (TA Amiens, 18 juillet 2002, commune de Léglantier, n°021245).

Enfin, le fait pour un élu de mal remplir ses fonctions ne justifie pas une démission d’office.

Une stricte procédure doit être respectée avant de déclarer l’élu démissionnaire d’office.

2. La démission d’office doit être précédée du respect d’une stricte procédure

Parce qu’elle emporte des conséquences exceptionnelles, la démission d’office ne peut être constatée qu’au terme d’une stricte procédure. Le maire doit avoir adressé une vraie convocation préalable à chaque conseiller municipal (2.1) et le conseiller municipal doit avoir réellement refusé d’accomplir une des fonctions dévolues par les lois (2.2).

2.1 Le maire doit avoir adressé une vraie convocation préalable à chaque conseiller municipal

En premier lieu, le maire doit avoir régulièrement convoqué le conseiller municipal concerné à accomplir une de ses fonctions. Par exemple, le maire doit avoir concrètement adressé ou remis en main propre un courrier individuel à chaque conseiller municipal de convocation à exercer la fonction d’assesseur lors d’élections à venir. Le caractère impératif de la convocation doit résulter des termes de ce courrier.

Le maire doit être en mesure de prouver la réalité de cet envoi et sa bonne réception par le conseiller municipal, dans un délai raisonnable permettant à l’intéressé de prendre connaissance de la demande et d’y apporter une réponse sérieuse.

La procédure n’est pas respectée si le maire se borne à adresser un vague courrier général à tous les conseillers municipaux leur demandant leur « disponibilité » pour la constitution des bureaux de vote d’une élection à venir (TA Amiens, 6 mai 2004, Commune de Le Hamel). Il va de soi qu’une demande adressée par SMS par le maire serait également aisément contestable.

2.2 Le conseiller municipal doit avoir réellement refusé d’accomplir une des fonctions dévolues par les lois

L'article L. 2121-5 du CGCT prévoit que le refus du conseiller municipal de remplir une des fonctions dévolues par les lois peut résulter :

- D’une déclaration expresse adressée à qui de droit ou rendue publique par son auteur (refus express) ;
- Ou d’une abstention persistante après avertissement de l'autorité chargée de la convocation (refus implicite).

La première hypothèse ne pose pas de grandes difficultés : le refus du conseiller municipal d’accomplir ses fonctions résulte d’un texte écrit, comme une lettre ou un tract, porté à la connaissance du maire ou du grand public, par quelque moyen que ce soit (courrier postal, courriel, réseaux sociaux, etc.).

La seconde hypothèse, la plus fréquente, est aussi la plus difficile à appréhender : il s’agit de la situation où le conseiller municipal s’abstient de répondre au maire qui l’a régulièrement convoqué pour exercer ses fonctions (silence du conseiller municipal). Dans ce cas de figure, le texte exige que le maire ait adressé un « avertissement » à l’élu concerné et que ce dernier se soit abstenu de manière persistante d’accomplir ses fonctions malgré cet avertissement. L’exigence de l’avertissement est simple à comprendre, car le texte prévoit que l’abstention doit être « persistante ». Il faut donc prévenir le destinataire de la possibilité de la mesure avant de pouvoir l’appliquer. L'avertissement constitue une condition substantielle de la mise en œuvre de l'article L. 2121-5 du CGCT (TA Rouen, 25 octobre 1985, Maire de la commune d'Ezy-sur-Eure). Ici encore, le maire doit être en capacité de prouver la réalité de l’avertissement adressé au conseiller municipal et sa bonne réception par ce dernier. Les termes de l’avertissement ne doivent pas être ambigus et mentionner clairement l’obligation d’accomplir les fonctions et la sanction de démission d’office applicable (CE, 20 février 1985, Behuret, n°62778).

L’avertissement préalable à la mesure ne se confond pas avec la convocation initialement adressée au conseiller municipal : il faut donc deux envois. L’avertissement doit par ailleurs être adressé dans un délai raisonnable c’est-à-dire permettant encore à l’intéressé d’exercer sa fonction (et pas la veille du scrutin ou de la réunion de la commission d’appel d’offres à 22H). Enfin, la procédure n’est pas respectée si le maire prend par exemple acte du refus tacite d’un de ses conseillers d’exercer une de ses fonctions et désigne un autre conseiller à la place pour ce faire.

3. Une excuse valable peut permettre d’excuser l’élu

Seule une « excuse valable » peut permettre au conseiller municipal de refuser de remplir une des fonctions qui lui sont dévolues par les lois (CE, 21 octobre 1992, Alexandre, n° 138437).

Ont été jugées comme des excuses valables à ce titre :

- Une pathologie médicale sérieuse et établie par un certificat médical (CAA Paris, 1er décembre 1998, Maire de Nogent-sur-Marne, n°97PA02557) ;
- Un certificat médical portant arrêt de travail (CAA Versailles, 30 décembre 2004, Mme Chantal X., n° 04VE01719) ;
- Une réunion familiale exceptionnelle prévue de longue date (60 ans de mariage - CAA Nantes, 2 octobre 2007, Chopp, n°07NT01704).

À l’inverse, ne constituent pas des excuses valables à ce titre :

- Des « raisons personnelles » ou de vagues « charges de famille » sans explication (CE, 21 mars 2007, Mme Sofia A., n°278438) ;
- Des certificats médicaux postérieurs ;
- Un refus de vaccination.

Si les conditions sont réunies, c’est le tribunal administratif qui prononce la démission d’office du conseiller municipal.

4. C’est le tribunal administratif qui prononce la démission d’office du conseiller municipal

La démission d'office des membres des conseils municipaux est prononcée par le tribunal administratif.

Le maire ne peut donc pas lui-même prononcer la démission d’office de son conseiller municipal et doit obligatoirement saisir à cet effet le juge administratif dans le strict délai d'un mois à compter du refus du conseiller municipal, à peine de déchéance. L’habilitation du conseil municipal à cet effet n’est pas nécessaire, s’agissant d’un pouvoir propre.

Le tribunal administratif dispose alors d’un délai d’un mois pour statuer, faute de quoi il est automatiquement dessaisi. Le maire a dans cette hypothèse un nouveau délai d'un mois pour saisir la cour administrative d'appel de cette même procédure.

Lorsque le tribunal administratif prononce la démission d'un conseiller municipal, le greffier en chef en informe l'intéressé en lui faisant connaître qu'il a un délai d'un mois pour se pourvoir devant la cour administrative d'appel, qui juge alors en trois mois.

Le conseiller municipal démissionnaire ne peut être réélu de ce même mandat avant un strict délai d'un an (article L. 235 du code électoral).

La démission d’office du conseiller municipal déclarée par le tribunal administratif emportera des conséquences.

5. Les conséquences de la démission d’office du conseiller municipal

Dès lors qu’il est déclaré démissionnaire d’office par le tribunal administratif, le conseiller municipal démissionnaire ne peut plus participer aux séances du conseil municipal. Son siège devient donc vacant au sein du conseil municipal.

Les conséquences diffèrent suivant la densité de la commune :

- Dans les communes de plus de 1 000 habitants, le candidat venant sur une liste immédiatement après le dernier élu est appelé à remplacer le conseiller municipal élu sur cette liste dont le siège devient vacant pour quelque cause que ce soit (article L. 270 du code électoral) ;

- Dans les communes de moins de 1 000 habitants, lorsque le conseil municipal a perdu, par l'effet des vacances survenues, le tiers ou plus de ses membres, ou qu'il compte moins de cinq membres il est, dans le délai de trois mois à dater de la dernière vacance, procédé à des élections complémentaires. Toutefois, à partir du 1er janvier de l'année qui précède le renouvellement général des conseils municipaux, les élections complémentaires ne sont obligatoires qu'au cas où le conseil municipal a perdu la moitié ou plus de ses membres ou qu'il compte moins de quatre membres (article L. 258 du code électoral).

Enfin, si le conseiller municipal avait également un mandat de conseiller communautaire, sa démission d’office entraînera également la déchéance de ce second mandat (mais pas l’inverse).

***

Textes de référence :

« Tout membre d'un conseil municipal qui, sans excuse valable, a refusé de remplir une des fonctions qui lui sont dévolues par les lois, est déclaré démissionnaire par le tribunal administratif.
Le refus résulte soit d'une déclaration expresse adressée à qui de droit ou rendue publique par son auteur, soit de l'abstention persistante après avertissement de l'autorité chargée de la convocation.
Le membre ainsi démissionnaire ne peut être réélu avant le délai d'un an ».
« Dans les cas prévus à l'article L. 2121-5, la démission d'office des membres des conseils municipaux est prononcée par le tribunal administratif.
Le maire, après refus constaté dans les conditions prévues par l'article L. 2121-5 saisit dans le délai d'un mois, à peine de déchéance, le tribunal administratif.
Faute d'avoir statué dans le délai fixé à l'alinéa précédent, le tribunal administratif est dessaisi. Le greffier en chef en informe le maire en lui faisant connaître qu'il a un délai d'un mois, à peine de déchéance, pour saisir la cour administrative d'appel.
Lorsque le tribunal administratif prononce la démission d'un conseiller municipal, le greffier en chef en informe l'intéressé en lui faisant connaître qu'il a un délai d'un mois pour se pourvoir devant la cour administrative d'appel.
La contestation est instruite et jugée sans frais par la cour administrative d'appel dans le délai de trois mois ».


En matière de contestation des permis de construire des sociétés, le Conseil d'État juge que la notification prévue à l'article R. 600-1 du code de l’urbanisme peut indifféremment être effectuée à l'adresse indiquée au sein de l'acte attaqué ou au siège social de l'entreprise.

L’article R. 600-1 du code de l’urbanisme fixe une règle très importante : en matière de recours contre un permis de construire (gracieux ou contentieux), l'auteur du recours est tenu de prévenir lui-même l’auteur de la décision (souvent la commune) et le titulaire de l’autorisation (souvent le voisin).

Cette notification doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de 15 jours francs à compter du dépôt du recours.

Il faut se conserver la preuve de ces envois pour pouvoir en justifier auprès du tribunal.

À défaut, l’irrecevabilité du recours sera constatée par le juge, sans examen au fond du dossier.

Une question se pose toutefois fréquemment en pratique lorsque le bénéficiaire du permis de construire est une société, car les sociétés ont souvent plusieurs adresses : alors, où adresser la notification ?

D’autant que certaines juridictions avaient déclaré irrecevables des recours notifiés au siège social de l’entreprise, qui différait de l’adresse mentionnée au sein du permis de construire.

C’est la question à laquelle les juges du Palais Royal ont apporté une réponse précise le 20 octobre 2021.

Le Conseil d’État a ainsi jugé que, pour les sociétés, la notification imposée par l’article R.600-1 du code de l’urbanisme pouvait indifféremment être adressée à l’adresse figurant sur l’acte attaqué ou au siège social de l’entreprise.

L’auteur du recours a donc un choix libre :

  • Soit notifier son recours à l’adresse figurant au sein du permis de construire ;
  • Soit adresser la notification au siège social de l’entreprise.
Les deux options sont parfaitement valables au titre de l’article R.600-1 du code de l’urbanisme.

En pratique, la prudence conduit souvent à procéder à une double notification, aux deux adresses, surtout lorsque l’expiration du délai de notification est proche.

Il est en tout état de cause très important de se conserver une preuve d’envoi des courriers de notification envoyés dans les délais, afin de pouvoir en justifier auprès du juge administratif.

Untitled 1Des infirmiers et auxiliaires de puériculture ont fait valoir devant le Conseil d’État qu’ils n’étaient pas soumis à l’obligation vaccinale contre la covid-19 comme les autres professionnels de santé, car ils ne travaillent pas forcément en hôpital.

Par une ordonnance rendue le 25 octobre 2021, le Conseil d’État leur a donné tort en jugeant que tous les professionnels de santé étaient soumis à cette obligation vaccinale, sans exception selon le lieu d’exercice.

Le cadre juridique de ce litige est simple :

En raison de la dégradation de la situation sanitaire nationale du fait de la diffusion croissante du variant Delta, le législateur a institué une obligation de vaccination pour un certain nombre de professionnels et notamment les « professionnels de santé » et les « personnes exerçant leur activité dans les établissements de santé » (article 12 de la loi du 5 août 2021).

Sur cette base, la ville de Nanterre a indiqué, par des notes de service en date des 20 et 25 août 2021, que tous les personnels travaillant au sein des établissements de la petite enfance de la ville entraient dans le champ de cette obligation vaccinale, infirmiers et auxiliaires de puériculture compris.

Par un référé-liberté porté devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise puis devant le Conseil d’État, le syndicat CFDT des Hauts-de-Seine a fait valoir le contraire et contesté cette mesure au nom d’une trentaine d’agents des crèches de la ville.

Selon le syndicat, l'obligation vaccinale voulue par le législateur ne devrait s’entendre et s’appliquer qu’aux seuls professionnels de santé au contact de personnes vulnérables, ce qui ne serait pas le cas des personnels de la petite enfance comme les infirmiers et auxiliaires de puériculture qui travaillent dans des établissements de la petite enfance et non des établissements de santé.

Par une ordonnance du 25 octobre 2021, le Conseil d’État a rejeté la requête du syndicat CFDT et donné raison à la ville de Nanterre. Selon les juges du Palais Royal, l’obligation vaccinale contre la covid-19 est fondée sur deux critères alternatifs :

  • un critère géographique, à savoir que toutes les personnes exerçant leur activité dans un certain nombre d'établissements, principalement les établissements de santé et des établissements sociaux et médico-sociaux, sont concernées ;
  • et un critère professionnel, incluant tous les professionnels de santé.

Il est important de comprendre que ces deux critères ne sont pas cumulatifs, mais alternatifs (un seul suffit pour emporter obligation).

Or, selon le Conseil d’État, les infirmiers et auxiliaires de puériculture font partie des professionnels de santé régis par la quatrième partie du code de la santé publique. Il s'ensuit que même lorsqu'ils exercent leur profession non pas dans un établissement de santé, mais dans un établissement de la petite enfance, ils entrent quand même dans le champ de l'obligation vaccinale (critère professionnel).

Les infirmiers et auxiliaires de puériculture sont donc bien tous soumis à l’obligation vaccinale contre la covid-19, quel que soit leur lieu d’exercice professionnel, en raison de leur qualité de professionnels de santé.

Dans l’hypothèse d’un non-respect de cette obligation, la suspension des fonctions est encourue avec interruption du versement de la rémunération (article 14 de la loi du 5 août 2021), jusqu’à régularisation du statut vaccinal de l’agent.

La position du Conseil d’État est intéressante, car elle rappelle que, concernant les professionnels de santé, l’obligation de vaccination n’est pas conditionnée à la nature des tâches à accomplir ou au fait de côtoyer des personnes vulnérables.

En quelque sorte, selon le Conseil d’État la qualité de professionnel de santé et l’obligation vaccinale sont indissociables, car les professionnels de santé doivent montrer l’exemple quelles que soient leurs fonctions.

La règle est donc aujourd’hui très claire : un professionnel de santé ne peut pas se soustraire à l’obligation vaccinale contre la covid-19, quels que soient son lieu de travail et ses fonctions, à la seule exception notable d’une contre-indication médicalement reconnue.

Décision : Ordonnance du Conseil d'État du 25 octobre 2021, Syndicat Interco CFDT des Hauts-de-Seine, n°457230 - source https://lesprosdelapetiteenfance.fr/ 

Untitled 1C’est la journaliste Christine KELLY qui a médiatisé cette affaire : dans la nuit du 25 au 26 octobre 2021, le drapeau national bleu-blanc-rouge qui ornait la façade de la Préfecture de Basse-Terre a été « remplacé » par un emblème communautariste guadeloupéen. Ce geste politique visait à remettre en cause l’unité de la Nation française :

Mais peut-on impunément afficher ostensiblement son soutien à une cause indépendantiste au fronton d’un bâtiment public ?

La réponse est évidemment négative et les contrevenants s’exposent à de lourdes sanctions.

De jurisprudence constante, le Conseil d’État considère en effet que le principe de neutralité des services publics s'oppose à ce que soient apposés sur les édifices publics des signes symbolisant la revendication d'opinions politiques, religieuses ou philosophiques (Conseil d’État, 27 juillet 2005, Commune de Sainte-Anne, n°259806).

Le Conseil d’État avait d’ailleurs pris position à propos d’un drapeau indépendantiste martiniquais apposé sur la façade d’une mairie.

Le ministre de l’intérieur a réaffirmé cette interdiction en 2010 dans le cadre d’une réponse ministérielle : « L'apposition de banderoles de revendication sur des édifices publics (...) est contraire (au principe de neutralité) (...) Il revient au responsable des bâtiments concernés de faire retirer ces banderoles, le cas échéant, sous le contrôle du juge administratif. »

De surcroît, l’outrage au drapeau tricolore est puni d’une peine maximale de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende (article R645-15 du Code pénal).

Ces règles s’appliquent à tous les édifices publics de France, et donc à la préfecture de la Guadeloupe, qui ne sont pas des lieux adéquats pour porter des revendications politiques.

Elles protègent nos bâtiments publics de toute récupération politique, philosophique ou religieuse pour les consacrer à l'intérêt général. Et c'est très bien ainsi.


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